Si vous animez des séances de formation en présentiel, vous êtes fatalement confronté aux rythmes attentionnels de vos apprenants. Vous avez forcément remarqué que suivant les horaires, les capacités des uns et des autres sont plus ou moins bonnes.
D'une façon générale :
- Le matin, ça va
- Le début d'après-midi : c'est compliqué
- En fin d'après-midi, ça revient
Malgré tout : si les plages horaires du matin sont plutôt favorables à un travail "cognitif", tout dépend de votre habileté à proposer des séquences variées et implicantes. En gros, soit vous profitez de cette période pour transmettre de façon dynamique, soit vous passez à côté de cette magnifique opportunité.
L'art de la persistance cognitive
Qu'est-ce que la persistance ? Juste votre capacité à maintenir dans le temps votre motivation, votre attention, votre concentration dans le but de réaliser une tâche. Persister dans l'effort est fondamental. Favoriser cette capacité l'est tout autant.
Il y a plusieurs années, quand j'ai démarré mes actions de formation, je me suis posé pour imaginer mon intervention. Je viens du spectacle. Et si vous voulez que vos spectateurs profitent de votre "show", vous devez les embarquer dans une mise en scène rythmée, interactive, ludique. C'est pourquoi des codes existent : dans les déplacements, les intonations, la variété. Posez-vous cette question : quels ressorts utilisent les médias pour maintenir l'attention d'un spectateur ? Voici quelques éléments de réponse :
- Le suspens
- Les rebondissements
- Les enjeux
- L'interactivité
- L'humour
- Des promesses (d'argent dans les jeux, de résolution de problème dans les polars etc)
- Un temps limité
- Des défis
- Des cliffhangers : vous savez, à la fin d'un épisode d'une série, quand l'action se termine brutalement !
Nous sommes dans une société de l'immédiateté. Le saviez-vous ? Autrefois, dans les années 60, un comique pouvait se permettre de faire rire une fois pas minute. Aujourd'hui, c'est plutôt toutes les 10 secondes. Sinon, le spectateur s'ennuie et décroche. Le format des sketchs a changé.
Prenez les conférences TED et TedX : un format de 18 minutes, calibré pour coller à la durée moyenne de l'attention chez l'adulte. On sait aujourd'hui que si vous ne sollicitez pas votre interlocuteur dans les 30 mn, la chute de l'intérêt, et donc de l'attention, est brutale. Idéalement, questionnez vos apprenants, impliquez-les le plus possible et, si vous parlez, utilisez le storytelling.
Par exemple, dans mes formations, j'ai une séquence assez longue pour décrypter ce qu'on appelle la mémoire sémantique. Pour faire passer la pilule, je raconte une histoire (vraie) liée à mon passé. Je l'ai écrite en amont pour la scénariser et faire en sorte que cette histoire comporte des temps forts, de l'humour et un dénouement final. J'ai remarqué l'autre jour encore chez mes apprenants que cette séquence était particulièrement accrocheuse : n'hésitez donc pas à scénariser vos enseignements.
Et l'après-midi ?
Aïe : en France, on a cette belle habitude de faire du repas un moment privilégié. On mange au restaurant, et souvent on mange bien. On en profite. Résultat, le contre coup est mortel.
Vous devez, l'après-midi, privilégier les actions : les mises en pratique, les exercices de groupe, les échanges... Et faire bouger vos apprenants. En général, dès le retour du repas, j'invite mes apprenants à se mettre debout et me rejoindre. Là on pratique un truc ou deux, je les mets en mouvement. Et de retour à leur place, au bout de 30 mn, je leur propose immédiatement un second exercice différent. Je termine la journée sur ce même rythme et en fin d'après-midi je repars sur un apport un peu plus "théorique" en mobilisant à nouveau leur attention. J'obtiens de très bons résultats en procédant de cette façon.
La persistance dans la formation à distance
Enseigner à distance n'est pas aussi simple : l'apprenant se retrouve seul. Les débuts sont souvent très bons : motivé, il va rapidement découvrir le contenu, balayer sans doute le sommaire, cliquer ici ou là. Il est encore dans l'émotionnel.
Cependant, toutes les études montrent une baisse rapide et brutale de l'activité en ligne. L'apprenant, confronté à lui-même et à sa gestion personnelle du temps, remet souvent à plus tard. Et au final abandonne.
Enseigner à distance peut se faire de différentes façons : en vidéo, par écrit, par mail, en direct via des webconférences, voire des séances personnalisées. Voici ce qui fonctionne :
- des programmes courts et précis : enseignez plutôt des résolutions de problèmes
- de la variété : des vidéos, oui, mais n'hésitez pas à compléter par des apports complémentaires à l'écrit
- faites des résumés en quelques points (3 ou 4)
- si vous utilisez la vidéo : créez des vidéos courtes. 5 minutes, 6 mais pas plus
- relancez l'intérêt par mail
- utilisez le plus possible l'interactivité : QCM et autres exercices
Scénarisez vos contenus
Que ce soit en vidéo ou par écrit, en PDF ou directement sur votre site, apprenez aussi à scénariser vos contenus. Par exemple, j'ai longtemps utilisé des vidéos en 3 points :
- En théorie
- En pratique
- A vous de jouer
Mettez-vous à la place de vos apprenants : comment vous-même vous comportez-vous dans cette situation ? Par exemple, on voit très clairement que les formations longues sont peu efficaces. Sauf si vous donnez un RDV ponctuel, voire obligatoire (en échange d'une certification) à vos clients...
Et vous ? Comment vous y prenez-vous pour favoriser la persistance ? Répondez ci-dessous et partagez vos pratiques !
Vos réactions (3)
Merci Vincent, c'était justement une de mes questions du moment en vue de mes futures interventions.
Moi j'utilise beaucoup les energizers petits exercices rigolos pour refaire monter le niveau d' énergie et d'attention des apprenants.
Salut Vincent
Excellent article, on en avait parlé brièvement lors de la conférence hypnose et magie en avril 2015.
Une des astuces que j'utilise pour capter l'attention du lecteur et générer ainsi le phénomène de persistance est la contextualisation de l'information.
J'appelle cela la magie contextuelle.
J'utilise des mots qui modifie littéralement la perception consciente et immédiate de la personne sur son environnement et stopper son esprit critique qui tends à banaliser l'information perçue et donc à la rendre sans intérêt.
En d'autres termes c'est comme si celle-ci mettait une paire de lunette 3D et voyait le monde sous un autre angle ce qui génère ainsi un recadrage de perception, de l'attention qui augmente, et une optimisation de ses facultés de mémorisation.
Voici un petit jeu facile a faire: Prendre une feuille de papier blanc, tracer une ligne au milieu afin d'avoir 2 colonnes bien distinctes
Dans la première colonne écrivez des mots comme Anatomie,Squelette,scalpel,bétadine,médicament,infirmerie,gènes= généralement on pense médecine,le Médical...
Dans la 2 colonne mettez maintenant comme mot principal en majuscule le mot Sorcellerie et réécrivez par la suite les mots précédemment cités ainsi que ceux qui vous viennent à l'esprit.
la perception de la réalité s'en trouve modifier ainsi que le résultat.
Je me suis aperçu de ce phénomène en alliant différentes disciplines n'ayant "rationnellement" aucun liens et ou en utilisant des mots spécifiques dans des contextes prédéfinis (J'utilise le mot magicien à la place de thérapeute) pour recadrer stratégiquement les perceptions de la personne en thérapie.
Un cours d'histoire géo animé par un mentaliste aura des effets beaucoup plus prometteur sur la sollicitation de l'attention du lecteur qu'un cours animé par un prof de la discipline!
J'espère avoir su capter votre attention jusqu'au bout! et réussit à vous convaincre de l'utilité de ce phénomène que cela dit en passant est vraiment utile à maîtriser lorsque l'on anime des conférences.
Et comme le dit Vincent sur club-de-magie.com , les magiciens qui savent faire rêver sans utiliser de tours de magie sont rares!